Le développement du jouet dans le Jura est indissociable de l’activité de tournerie sur bois. C’est à l’abbaye de Saint-Claude, lieu de pèlerinage important au Moyen-Age, que l’histoire débute. L’affluence des pèlerins au XIIIème siècle crée la première demande d’objets de piété. Les moines utilisent le bois, la corne et l’ivoire pour confectionner eux-mêmes les patenôtres, aujourd’hui appelés chapelets. Les paysans des fermes alentours, à la recherche de revenus complémentaires en période hivernale, reprennent ce savoir-faire et fabriquent dès le XIVème siècle des petits objets et des jouets pour les enfants des pèlerins.
A partir de la fin du Moyen Age, le rayonnement de l’Abbaye de Saint-Claude s’affaiblit. La révolution de 1789 met fin aux pèlerinages et à la production d’objets de piété. Les tourneurs réorientent leur production tandis que les techniques se perfectionnent. A la fin du XVIIIème siècle, le « tour à roue », actionné par un manœuvre, remplace le «tour à archet » améliorant considérablement la productivité des tourneurs. Vers 1830...
Vers 1830, la force hydraulique se substitue à l’homme et entraîne les tours installés dès lors dans des moulins. La richesse et la variété des ressources en bois, tout comme l’abondance de l’eau, favorisent l’activité de tournerie et de tabletterie dans un « triangle d’or » délimité au nord par Lons-Le-Saunier, à l’est par Morez et au sud par Nantua. La variété des objets tournés (regroupés sous le vocable « bimbeloterie » ou « articles de Saint-Claude ») est grande mais des centres de production spécialisés apparaissent peu à peu dans le Jura et le Haut Bugey.
Les premiers jouets en bois tournés à Moirans-en-Montagne dateraient de 1820. Sifflets et flutes à bec, appelées aussi flageolets, constituent alors la spécialité des tourneurs moirantins. Vers 1850, le « bibi », petit sifflet surmonté d’un ballon de baudruche, fabriqué en milliers d’exemplaires dans la localité, lui vaut même le surnom de « Bibiville ». Au début du 20ème siècle, Moirans-en-Montagne devient l’un des principaux centres de tournerie sur bois et la capitale du jouet. Jeux de quilles, crécelles, ...
Jeux de quilles, crécelles, croquets et bilboquets, mais aussi jeux de cubes et de construction (influencés par les jouets allemands), puis jeux de société et porteurs, enrichissent l’assortiment des catalogues jurassiens. Les jouets tournés à Moirans se distinguent par leur décor peint pratiqué par les rubanneuses. L’électrification au début du 20ème siècle va modifier profondément l’organisation de la production dans la région. Les tourneurs ruraux, qui louaient leur place au tour dans les moulins, recouvrent l’autonomie – et leur domicile - en fixant un moteur à leur tour. Parallèlement, des petits ateliers communaux et des sociétés coopératives apparaissent, marquant la volonté des tourneurs d’échapper à l’emprise des négociants, intermédiaires incontournables pour vendre sa production aux grossistes. Le patriotisme économique, issu de la victoire de 1918 et renforcé par la crise de 1929, favorise les jouets français au détriment des productions allemandes. Dans l’entre-deux guerres, les techniques évoluent (mise au point de la rotative), les jouets en bois se complexifient (camions de pompier, baby-foot, jouets de plage) et les matières plastiques de synthèse (dont le celluloïd) séduisent de plus en plus de fabricants.
Après la seconde guerre mondiale, l’industrie du jouet connaît un essor considérable grâce à la transition du bois au plastique. Les jouets en celluloïd, puis en polymère de synthèse dérivés de la pétrochimie (plus communément appelé plastique), issus de nouveaux procédés de moulage (thermoformage, injection ou soufflage) sont produits en masse à prix réduits. Dopé par l’extraordinaire demande des « 30 glorieuses », Moirans, bien que concurrencé par Oyonnax, s’affirme comme la « capitale du jouet ». Les années 50, puis 60, voient l’émergence de ...
Les années 50, puis 60, voient l’émergence de nouveaux fabricants de jouets bon marché en plastique (jouets à 1 franc ou « cadeau bonux »). Ce marché prospère permet le décollage des futurs grands du jouet comme Moquin Breuil qui deviendra Smoby. Le jouet bois ne fait plus recette et sera victime d’un long déclin pendant au moins 30 ans. Pourtant, quelques ardents défenseurs du bois (Educalux, Vilac, Jeujura ou Lorge) maintiennent leur activité et construisent leur renommée sur un procédé de laquage innovant, devenu aujourd’hui la marque de fabrique du jouet en bois jurassien. Au début des années 60, la France est le 5ème producteur mondial. Un 6ème de sa production est exporté. L’exploitation de licences de personnages célèbres soutient le marché du jouet. Pour conforter leur place sur l’échiquier mondial, les principaux fabricants de jouets en plastique jurassiens vont unir leur force dès 1967 en créant le groupement SUPERJOUET qui devient 10 ans plus tard le 1er exportateur de jouets français.
Les années 80 sont le théâtre de profonds bouleversements dans le secteur du jouet. La concurrence internationale fait rage. Les jouets électroniques et les jeux vidéo sont de sérieux rivaux aux jouets traditionnels. Le jouet en bois ne représente qu’une infime part de marché. Les entreprises françaises doivent faire face à la contrefaçon et à l’évolution de la distribution. Pour séduire les consommateurs, les marques investissent dans de couteuses campagnes de communication. À la fin des années 80 et au début des années 1990 ...
À la fin des années 80 et au début des années 1990 des mouvements de concentration s’opèrent parmi les fabricants jurassiens. Durant l’été 1986, à l’initiative de Jean Burdeyron, maire de Moirans-en-Montagne, une exposition sur le jouet et les techniques traditionnelles dévoile aux visiteurs un peu de la longue histoire du jouet jurassien. Fin 1986, sous l’égide de la municipalité moirantine et de trente-deux entreprises du secteur, l’Association pour la Tournerie et le Jouet Français voit le jour. Présidée par Dany Breuil, directrice générale du fabricant de jouets jurassien SMOBY, elle a pour objectif de « faire revivre hier pour créer aujourd’hui le jouet de demain ». Certains verront là des réminiscences de l’esprit collaboratif haut-jurassien. En novembre 1987, le projet architectural d’une « Maison du Jouet » est validé. Les travaux sont lancés 1988.
En mai 1989, la Maison du Jouet, bâtiment d’inspiration industrielle aux couleurs vives, est achevée. Pour Guy Bonnivard, l’architecte, il s’agit d’un « gros Légo égaré sur une prairie du Haut-Jura ». Sa création vise à dynamiser et valoriser le secteur du jouet jurassien et dépasse largement le cadre d’un musée. Si elle retrace pour un large public l’évolution du jouet jurassien et ses techniques de fabrication, elle abrite également ...
Si elle retrace pour un large public l’évolution du jouet jurassien et ses techniques de fabrication, elle abrite également différents services destinés aux professionnels du jouet. Centre de recherche, antenne du Laboratoire National d’Essai (à partir de 1991), elle initie et coordonne des opérations collectives à destination des fabricants (participation à des salons, invitations d’acheteurs étrangers, actions de formation). Entre 1990 et 1996, le bâtiment s’agrandit et la muséographie évolue pour toujours mieux valoriser les collections et faire vivre le lieu.
Les rivalités entre entreprises et les difficultés financières rencontrées par l’Association d’artisans et d’industriels du jouet conduisent la mairie de Moirans-en-Montagne à reprendre la gestion du musée en janvier 1997. La commune lance une nouvelle dynamique : expositions, temporaires, atelier pédagogique, salle audiovisuelle… En 2002, le musée du Jouet reçoit l’appellation « MUSEE DE FRANCE ». Ses collections s’enrichissent. Il abrite alors ...
Il abrite alors 15.000 jeux et jouets représentant 4000 ans d’histoire, de l’Antiquité à nos jours. L’acquisition d’une collection exceptionnelle de 3.500 objets provenant du Musée du Jouet de Canet-en-Roussillon constitue en 2003 le premier acte d’un projet de rénovation des espaces muséographiques. Il faudra encore compter quelques années et l’opiniâtreté des élus locaux et des équipes du musée avant que le projet d’agrandissement et de renouvellement complet de la muséographie ne se concrétise. En 2009, la gestion du musée est transférée à l’intercommunalité qui portera désormais le projet.
En septembre 2010, le musée du Jouet ferme ses portes au public pour 22 mois de travaux. Donner un nouvel écrin à l’une des plus belles collections de jeux et jouets en Europe, offrir aux visiteurs la qualité d’accueil d’un musée moderne et respecter l’identité du bâtiment d’origine, tels ont été les enjeux confiés aux architectes BLANC POTARD (cabinet Arprau, Lyon) et DUBOIN (Saint-Claude). Depuis 1990, ...
Depuis 1990, le « quartier de l’enfant » qui accueille également médiathèque, crèche, école et centre de loisir, portent haut les couleurs vives rouge, bleu, vert et jaune, clin d’œil aux jouets laqués qui ont fait la renommée des fabricants locaux. L’architecture audacieuse imaginée par Guy BONIVARD en 1989 se devait d’être préservés et valorisés.
Le « nouveau musée du Jouet » ouvre le 1er juillet 2012. L’extension a permis un doublement des surfaces du musée qui s’étend aujourd’hui sur 3.400 m². L’ensemble architectural est cohérent et attrayant et l’identité du lieu a été renouvelée dans le respect des choix initiaux. Le long du bâtiment d’extension, surplombé par un triptyque d’émail et d’acier qu’anime le trait poétique de l’artiste Françoise PETROVITCH, les espaces verts accueillent des jeux extérieurs. À proximité de l’entrée du musée, un grand ...
À proximité de l’entrée du musée, un grand parcours de glisse et d’escalade vient s’appuyer sur la structure existante, imprimant une image ludique et moderne. Jeux et tables de pique-nique complètent l’équipement du lieu, propice aux rassemblements familiaux. A l’intérieur, la muséographie imaginée par L’atelier à Kiko met en scène près de 2000 jeux et jouets de toute époque et tous pays. Ressortis des malles et des greniers, ils prennent la pose, rassemblés par affinités et proximité de sens et s’offrent à nouveau aux regards et aux souvenirs des visiteurs. Un ourson de bois coloré accompagne le visiteur tout au long d’un parcours qu’animent des dispositifs audiovisuels et sonores. Des jeux virtuels ou réels invitent à des poses ludiques… parce qu’au musée du Jouet, on joue !
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